Tous les quatre ans, le cœur de milliards d’amateurs du ballon rond bat au rythme de la Coupe du Monde. Pourtant, entre corruption, désastre écologique et négation des droits de l’Homme, les voix sont de plus en plus nombreuses à s’élever pour un boycott de la compétition qui se déroulera au Qatar dans 20 jours exactement. Mais quelle place occupent les médias dans un événement aussi controversé que contesté ?


Un appel collectif au boycott citoyen du mondial Qatari


Sur des comptes d’information générale ou spécialisée dans le Football, par l’intermédiaire de leaders d’opinion et personnalités publiques ou encore à travers la communication de grandes marques, la sensibilisation s’accélère et la mobilisation s’accentue. Les appels au boycott, dans le concert médiatique de manière générale ou sur les réseaux sociaux en particulier, font réagir. Est surtout évoquée ici l’idée de “boycott citoyen” là où la prise de conscience semble effective et collective : les messages relayés sur les réseaux sociaux provoquent un engagement réel et certain. Mais jusqu'où cet engagement peut-il aller ? L’engagement porté par toutes ces voix sur les réseaux peut-il être suffisamment important pour que les fans, même les plus férus de ballon rond, n'allument pas leur télévision, espérant plomber les audiences des diffuseurs de la FIFA ?


Le positionnement des médias face à la Coupe du Monde


Le 13 septembre dernier, un média pourtant peu connu en métropole, fait la une de l’actualité. Et pour cause, le Quotidien réunionnais publiait en une de son journal, “Sans nous, au nom de ses valeurs, le Quotidien boycotte la Coupe du Monde 2022”. Une décision loin d’être sans conséquence puisqu’elle aura des répercussions financières pour le journal : en effet, le refus de relayer l’événement tout au long de sa tenue privera le Quotidien de la Réunion de rentrées d’argent non négligeables. Vincent Vibe, le directeur du Quotidien de la Réunion, a d’ailleurs déclaré “Quand on ne publiera pas de comptes rendus des matchs et quand on ne publiera pas de publicité, forcément on se privera de rentrées d'argent. Mais ça, c'est une question qu'on a très rapidement mise de côté. On s'est dit 'on va d'abord porter nos valeurs'”.

Un boycott dont s’est rapidement emparée la presse nationale faisant le tour des journaux et radios. Pourtant, aucun d’entre eux ne semble se positionner comme l’a fait le Quotidien réunionnais : si les appels au boycott sont portés par des personnalités publiques (Éric Cantona, Philipp Lahm, Vikash Dhorasoo...), les médias ne semblent qu'en faire le relai, sans se positionner réellement. Alors que l’opinion publique pouvait s’attendre à un engagement plus conséquent de la part des médias, l’appel à l’argent généré par la couverture du mondial semble plus fort : ils couvriront tous (ou presque), l’événement.


Quelle alternative pour les médias ?

En voilà un paradoxe : relayer les aspects peu reluisants de l’événement tout en couvrant chacun de ses matchs pour conserver le lectorat associé, préserver ses revenus publicitaires et éviter de se mettre à dos les marques partenaires. Un manque à gagner trop important pour la presse : là encore, c’est le foot-business qui gagne. Pourtant nombreux sont les journaux qui suivront ce schéma.


D’autres, au contraire, pourraient faire le choix de relayer au minimum l’information sportive pour ne pas vexer le lectorat associé et ce, au profit d’une mise en lumière d’investigations plus poussées sur la tenue du Mondial. Mais quels seront-ils ?

Le mot de la fin


Et il est pour Arnaud, lecteur du média So Foot : “en tant qu’amoureux du foot, je ne peux pas regarder ça, parce que ça serait le cautionner, se rendre complice. Ce serait dire aux instances et au business du foot : "Allez, c’est pas si grave que ça finalement, continuez vos obscénités du moment que j’ai mon match de foot à mater après ma journée de travail." ; “Ce n’est pas ça le foot que j’aime. Ce n’est pas ça le foot tout court. Et puis j’ai mon fiston de 10 ans, à qui j’ai inoculé le virus du foot, et ça serait renoncer aux valeurs que je mets dans son éducation de regarder cette compétition et de le laisser la regarder avec moi. Encore une fois, mon boycott sera purement symbolique, mais les symboles ça compte aussi.”

Et vous, dans tout cela, allez-vous, ne serait-ce qu’allumer votre télé pour regarder la Coupe du Monde ? Rendez-vous dans un mois pour faire le bilan des audiences des diffuseurs… pour faire le bilan de nouvelles révélations, entre valeurs humanistes et environnementales et dures réalités.